Un jour, alors que nous étions à Manhattan pour regarder passer la parade de Thanksgiving, je m’arrête auprès d’un clown que je voulais prendre en
photo et je lui demande urbainement : « may I please take a picture ? ». Un monsieur en costume qui s’était arrêté pour la même raison que moi, me regarde éberlué. Il me dit que franchement – il est avocat – il maîtrise parfaitement la langue de Shakespeare mais qu’il n’entend plus souvent des gens qui distinguent encore « may » et « can ». Alors une Frenchie, no way! Yes we can ! lui réponds-je vexée, je connais mon Barack par cœur. Je dois avouer que c’est Jade qui m’avait rappelé la différence deux ou trois jours plutôt car sa maîtresse lui avait répondu à un « can I go to the bathrooms ? », « I don’t know I’m not you ». Du coup, ce jour-là, je m’exerçais. D’ailleurs avais-je vraiment envie de prendre cette photo ? God only knows.
Donc revenons à nos moutons, l’autre jour, grâce aux potins entre mamans à l’école, j’ai trouvé un bon exemple qui vous permettra de bien comprendre la différence entre « may » et « can » : du correct usage des jardins américains si accueillants. Une de mes commères, étrangère mais vivant ici de longue date, nous explique qu’elle apprend les règles de sécurité de base à sa fille : dimanche dernier, elle se rend avec son mari chez des amis (pas dans le Bronx, dans le Wechester donc l’un des endroits où il y a sans doute le moins d’armes aux Etats-Unis, du moins j’espère vu que c’est là que j’habite). Il fait nuit, il neige. Ils ne sont pas sûrs de s’être arrêtés devant la bonne maison. L’enfant se met à courir pour s’abriter sous le porche. Malheureuse ! la mère la rattrape au vol et lui dit : « tu ne dois jamais, jamais courir comme ça dans un jardin américain, de nuit… tu me donnes la main et on marche très doucement. » Connement, je m’exclame : « are you crazy ! why ? » ; « Why ?, she says, because they might shoot you ! ». Vous ne voyez pas le lien avec «may » et « can » ?
Dans un jardin américain, libéré des clôtures si françaises : you CAN entrer sans qu’on vous ouvre. Mais comme vous ne savez pas si derrière la porte il n’ y a pas quelqu’un avec une arme à feu automatique qui a peur de ses voisins, du facteur, d’une petite fille de 8 ans, du livreur de pizza… j’en passe et des meilleurs, you’d better assume that you MAY not entrer sans qu’on vous y convie ; faute de quoi, vous pourriez ressortir les pieds en avant. Vous ricanez ? … L’autre commère ajoute qu’elle venait de lire dans je ne sais quel journal (j’ai pas vérifié mais même si c’est faux ça vaut son pesant de cacahuètes) qu’une femme avait appelé les secours car son mari faisait un malaise. L’ambulancier arrive, trouve le type par terre, inanimé, il fait son boulot, bien d’ailleurs, trop bien même, il le ressuscite et le type revenu d’ad patres lui tire dessus et le tue je crois. Ne présumez jamais ici que you MAY entrer….même quand on vous appelle au secours ! Quand on vous appelle à l’aide, répondez plutôt comme David Crockett : « You may all go to hell and I will go to Texas ». C’est quand même plus raffiné dans l’insulte que « Go f.. yourself ». Mais n’allez pas forcément au Texas, ils ont encore plus d’armes là-bas.