Un miracle de Noël ? Un happy Trumpmas ?

Il l’avait pourtant éructé  sous toutes les formes possibles “I’m going to put criminals behind bars,” Tough on crime, qu’il allait être le Donald, contre les rapistes mexicains contre les black des inner cities. Tous en prison qu’il allait les mettre. Il allait à lui tout seul améliorer le taux d’incarcération qui n’en avait pourtant pas vraiment besoin. Pensez : avec 5% de la population mondiale, les USA réussissaient à loger 25% des prisonniers du globe dans leurs prisons, multipliant grosso modo leur population carcérale par 10 entre 1970 et maintenant (200,000 personnes en 1970  à plus de 2 millions). Donald trouvait que 0.7% de la population incarcérée, c’était pas comme ça qu’on allait make America great again, à peine devant le Rwanda (0,6%), la Russie 0,5% ou le Salvador (0,4%). Heureusement que ces crétins d’européens avec leurs pauvres 0,1% en France, 0,06% au Danemark étaient loin derrière dans la course. Même les British étaient ridicules avec leur 0.15%.

Il allait donc reprendre le flambeau de la ‘war on drug’ allumé par Nixon, repris par Reagan et qui avait flambé haut et clair dans les années 80, 90, notamment grâce à Clinton qui se battait contre les ‘super prédateurs’. Donald se marrait en reprochant à Hillary de vouloir corriger les erreurs de Monsieur. Il fallait lock her up.  Cela ferait une femme de plus en prison, histoire d’améliorer aussi le pourcentage de femmes incarcérées malgré la médaille d’or de son pays dans ce domaine aussi.

Je ne vois pas trop ce qu’il reprochait au système. C’était quand même top de pouvoir emprisonner tranquillement plus de noirs que de blancs. Il y avait eu quelques mesures de génie comme des peines planchers bien ciblées : 5 grammes de crack et hop t’en prenais pour 5 ans. Pendant ce temps-là c’était beaucoup plus compliqué avec la cocaïne. Là il fallait vraiment bosser : 500 grammes pour avoir la même peine. Ce n’était quand même pas de la faute des législateurs si on consommait du crack dans les inner cities et de la coke à Wallstreet ou Beverly Hills. Et puis tout ça était bon pour l’économie, en tout cas pour celle du business de prisons privées. Imaginez un secteur à contre-cycle comme celui-là : alors que la criminalité baissait, le taux d’occupation des prisons augmentait. Génial non ? L’Etat garantissait même des taux d’occupation aux gestionnaires privés … de manière contractuelle. Facile en même temps avec la loi ‘3 strikes’  de Billou :  tu récidives 2 fois même sur des crimes relativement peu violents et hop tu te prends perpète. Du coup, les prisons poussaient comme des champignons. Les écoles, ponts et autres routes moins. Prévention non, punition oui.

Bref, quand Obama, offusqué de voir les noirs tomber comme des mouches sous les flingues de la police, s’est dit qu’il allait confier une réforme du système à un groupe bipartisan, cela n’a plus à tout le monde. Pourtant il avait réussi à constituer un groupe de travail mené par Chuck Grassley ; des deputés et sénateurs des deux bords avaient pour une fois travaillé ensemble dans un but commun  avec des propositions pour changer le système judiciaire. Ils avaient accouché du ‘Sentencing Reform and Corrections Act’. C’était ‘a shining example of the way Congress is supposed to work: lawmaking through careful negotiation and compromise for the betterment of our country.‘ comme le soulignait une lettre au Majority Leader Mitch McConnell. Mais non Mitch, lui il ne voulait pas signer cette loi. Fallait d’abord embêter Obama, reprendre le pouvoir. Lui vivant, la loi ne passerait pas au vote. Rideau.

Vous connaissez la suite, Trump élu en 2016…. On allait build des walls autour du pays et à l’intérieur.

Mais voilà t’y pas qu’au début de l’automne  2018, ressort de l’oubli ce même projet de loi et qui le défend ??? Trump… qui réussit à convaincre Mitch. Pincez- moi, je rêve. Il allait réformer un système ‘so unfair’ pour les communautés noires. Forcément tout ça était de la faute à Clinton, Monsieur : le ‘3 strikes’ bill c’était de sa faute à lui Bill. Pour une fois, Trump n’avait pas tort. Et lui, Donald il allait tout changer. Et here we are. The First Step Act a été voté aujourd’hui. Il permet notamment la mise en œuvre rétroactive du ‘Fair sentencing Act de 2010 qui visait à réduire la disparité injuste des sentences. Il réduit certaines peines-plancher, et réforme les ‘3 strikes’ and you’re out de Clinton. Et puis surtout, la loi vise à réduire les récidives, aider les prisonniers à se former en prison pour mieux se réinsérer, ceux ayant des comportements exemplaires à obtenir des réductions de peines… Les femmes enceintes ne seront plus obligées d’accoucher menotées au lit par les pieds et les mains (non ce n’est pas une blague).

Bon bien sûr tout n’est pas parfait. Certaines mesures sont controversées mais surtout la réforme ne touche que les prisons fédérales donc en fait moins de 10% de la population carcérale qui agglutinée dans les prisons des Etats.

Les deux bords crient au miracle de Noël : les frères Koch, l’activiste Van Jones, Nancy Pelosi, l’ACLU. Ted Cruz ! Certains  leaders politiques afro-américains ont quand même exprimé dans une lettre leurs inquiétudes que cette loi n’ait en fait pas plus d’impact négatif que positif pour les minorités : John Lewis, figure du mouvement afro-américain des droits civiques et membre de la chambre des représentants, Kamala Haris, sénatrice de Californie et qui pourrait se présenter aux prochaines élections présidentielles, Sheila Jackson-Lee autre membre de la chambre. Espérons que ce ‘First Step Act’ soit effectivement un first step…  en avant et pas backward.

Que cela soit au crédit officiel de Trump … et pas d’Obama ? J’ose penser qu’Obama se réjouit malgré tout.

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